INCANTATIONS
INCANTATIONS DU CHANT
La Poésie est l'incarnation multiforme du Souffle dans les langues humaines.
Réinventer l'inspiration. Par-delà la mort de la Poésie.
Tentative folle de dire l'indicible.
La poésie est la part intraduisible de chaque langue.
"POÉSIE.
IMAGES ET MOTS QUI REFLÈTENT L’ÉTAT SANS IMAGES ET SANS MOTS. MUSIQUE.
SONS QUI REFLÈTENT L’ÉTAT SANS SONS. MOTS ET SONS ÉQUIVALENTS AU
SILENCE." (SIMONE WEIL)
Poésie : expérience du non-saisir, du laisser-venir, du laisser-advenir.
Naître parole à travers le silence sans mesure, stellaire.
Ma source se trouve dans l'absolue solitude, dans l'intériorité silencieuse: là, me détachant du monde, je m'ouvre au dire entier du monde, Poésie.
Le fond de l'homme malgré tout est poésie.
LOUIS-FERDINAND CÉLINE
Mots comme pierres précieuses,comme floraisons magiques, comme éclairs émergeant de la nuit, du silence.
La poésie, la musique soulignent le silence; elles ne le comblent pas.
La poésie est un acte de foi, un cri dans le vide abyssal du monde.
« LE POÈTE EST LA PARTIE DE L'HOMME RÉFRACTAIRE AU PROJET CALCULE » (RENÉ CHAR).
Vivre en poète, c'est étreindre intimement la folie de l'existence.
Vivre, c’est vivre le Verbe, le vertige infini du Verbe. Laisser parler à travers le corps l'existence à la fois humble et grandiose. Balbutier, murmurer, chanter, crier le mystère de l'existence, l'ardente inconnaissance. Poésie, noyau de la vie.
Le nom des poètes irradie:
Homère,Pindare,Virgile,Dante,Basho,Villon,Goethe,
Novalis,Hölderlin,
Hugo,Pouchkine,Nerval,Keats,Whitman,Leopardi,Dickinson,
Baudelaire,Mallarmé,
Rimbaud,Rilke,Tagore,Apollinaire,Trakl,Yeats,Breton,Lorca,
Saint-John Perse,Tsvetaïeva,Senghor,Neruda,Celan...
La grande poésie nous relie à notre part divine.
Caractère sacré,fulgurant, confinant à la folie,des génies les plus inspirés,
Bouddha,Jésus,Virgile,Dante, François d'Assise, Mozart,Blake,Novalis,Hölderlin,Hugo,Kierkegaard,Nietzsche,VanGogh,Rlmbaud,
Kafka,Rilke,Trakl,Simone Weil.
DÉSIR D’ŒUVRE
cathédrale sans
contours mobile compacte effervescente gracieuse colossale
jaillissant comme ailée dans l'azur libre
avec des ciselures méticuleuses
des
niches abritant des vierges souriantes
avec des cryptes
ténébreuses
des forêts d'animaux grimaçants
des piliers végétaux
des rosaces
liquides
démesuré mesuré hiéroglyphe nocturne solaire
irisations irradiations
écriture de
meurtre
de marbre
éclatement
extrême
extrême élaboration
chants à naître
attentes banderoles
brises des occidents en fête
fruits futurs suspendus comme
pierreries
dans l'aurore
toujours nouvelle
incandescences
nudité
densité
J’HABITE UN PAYS D’INCANDESCENCE
UN PAYS DE SAINTE DÉRAISON
SON NOM EST POÉSIE
LUMIÈRE D’ORPHÉE
Je suis Orphée le Poète.
Voici, je me lève et je déclare aux assis, aux assoupis, aux endormis, aux ectoplasmes, oui je déclare clairement, distinctement, à pleine gorge
que je suis poète.
Voici, je me lève et je déclare aux assis, aux assoupis, aux endormis, aux ectoplasmes, oui je déclare clairement, distinctement, à pleine gorge
que je suis poète.
Les mots brûlent dans mes entrailles, les mots saignent en moi, les mots m'enivrent comme de l'alcool.
Voici, je me lève et je déclare aux créatures du bon Dieu, je
suis Orphée, le Poète, l’Étranger fabuleux, la voix des êtres muets. Voici,
je vais incanter, transfigurer toutes les créatures terrestres.
Et je déclare aux pierres, aux âpres rocs, je vais pénétrer
de mon dire chaleureux votre terrible, froide opacité. Pierres précieuses,
diamants, améthystes, opales, je dilapiderai votre luxe royal.
Et je déclare aux arbres, j’imbiberai de ma fluide énergie
votre compacité, vos troncs rugueux mangés de lierre, vos racines plongeant
dans les entrailles terreuses, vos floraisons enchanteresses, vos opulentes
profusions de fruits.
Et je déclare aux fleurs, jonquilles, coquelicots, glaïeuls,
et vous lys candides, je vais glorifier votre humble merveille, je vais chanter
votre féérie multicolore à travers jardins, prairies et bois.
Et plein d’humilité et d’admiration, je déclare aux bêtes, je
suis Orphée votre chantre.
Fauves, requins, je célébrerai votre force indomptable, votre
splendide cruauté ; gazelles et biches, je louerai vos élans gracieux;
reptiles, aigles et vautours, je magnifierai votre sauvage beauté. Oiseaux de
nos bois, de nos champs, je vais rivaliser avec votre mélodieuse légèreté, vos
danses aériennes, vos ivres ascensions dans la lumière d’été.
Alouettes, alouettes, voltigez jusqu’à l’extase dans
l’immensité bleue au-dessus des houles de blé et semez vos perles sonores comme
des gouttes de lumière en trilles et roulades à travers l’azur libre.
Et voici, je me dresse la nuit comme un veilleur au milieu de
la plaine, et je déclare aux myriades d’étoiles scintillantes, je vais
illimiter la Voie lactée en galaxies de rêve jusqu’aux confins de l’univers, je
vais déployer le grandiose poème de la naissance et de l’explosion des soleils,
l’ode de l’imperceptible expansion des milliards de mondes, sidérantes
cosmogonies.
Je suis l’officiant des liturgies de la clarté du Jour et de
la ténèbre mystérieuse de la Nuit d’où émergent toutes les créatures. Je médite
la Genèse infinie, je contemple les arc-en-ciel, lien somptueux entre les
habitats de glaise terrestre et les hauteurs du firmament, je rêve les aurores
éternellement surgissantes.
Et voici, je sors de ma tour d’ivoire et je marche dans les
cités humaines, je traverse les rues et les places, et je m’égare dans
les zones de perdition jusqu’à la folie, j’erre dans les déserts de soif
à la recherche du Visage angélique perdu, en quête sans fin de beauté, d’amour,
de joie nuptiale ; je viens de loin, de l’enfer même, des contrées de
fange, d’angoisse et de deuil, et voici, j’avance dans la lumière, rayonnante
tête d’or couronnée de lauriers, brandissant ma lyre électrique, et je déclare
avec véhémence aux pitoyables humains aux semelles de plomb, dévorés de soucis,
de sombres passions, dévoreurs de fades nourritures, sourds à la poésie, sourds
et muets, fermés au cantique profond des créatures, je leur déclare sans
tergiverser, je vais ouvrir de force vos oreilles, je vais sensibiliser vos
cœurs et vos tripes au Verbe vertigineux, au chant du visible et de
l'invisible, du tragique et de la joie, de la vie et de la mort.
Je vais hanter vos jours et vos nuits de mes versets
incandescents, de mes cantilènes nostalgiques, de mes psalmodies lancinantes.
Mes ïambes, mes anapestes seront récités par les aèdes, scandés par les voix
cristallines des enfants, les haut-parleurs hurleront mes stances portées au
loin par les ondes, par les vents allègres, mon tendre langage sera susurré par
les brises duveteuses, les sources aux fraîcheurs de menthe, les ruisseaux
vagabondant à travers prés et prairies en fleurs.
Frères humains, sœurs humaines, je suis le messager
inspiré, le témoin du cœur du monde, le voyant, l’initié aux mystères, le
magicien mariant verbe et musique.
Je suis David le harpiste, Li Po le Chinois, Basho le
Japonais, Pindare, Virgile, François d’Assise entonnant LE CANTIQUE DES
CRÉATURES, Hafez le Perse, Dante, Hölderlin, Hugo, Rimbaud, Whitman, Trakl,
Tagore, Neruda, Césaire.
Je suis Orphée le Logos vivant, Orphée-Phoenix toujours
ressuscitant, je suis les mille et une voix de la Création, ce chaos
inimaginable, cette immense Bouche d’ombre qui ne parle pas, ce mystère infini,
cette infinie magnificence, expansés follement dans des abîmes de silence.
Je suis la voix d’Orphée illuminant le monde abyssalement
mutique, je suis la voix innombrable venant du tréfonds aimant et qui se
répercute d’écho en écho jusqu’aux dernières limites de la Création.
Je suis Orphée-Christ, la lumière du Verbe de Vie plus
profonde que toute vie.
TRANSFIGURER
TOUTES LES CRÉATURES TERRESTRES
S DIAFA LIAD VUM LAWA
D Arda schloft.
D Menscha schlofa,
Schwàrzer, bleïschwarer Schlof.
Sprochlos vegetiara mr,
Vrstummt, vrstummt, Gottverlo.
Jetz vrwàch, Arda!
Vrwàcha, Menscha!
Stehn uf, Poeta, Dechter üs dr Heimet,
un empfànga s Wort.
Heera züa!
D Werter senga wia Vegala im Friaïjohr.
D Werter bliahïa uf wia Blüama.
Vrwàch, Müatersproch, diafa Ardasproch.
Fresch, grian Gràs esch s elsassischa Reda.
Stehn uf, Kender vu dr Heimet, Blüamakender, Sunnakender,
un senga un tànza frehlig im Morgaliacht.
Doïssigi Stemma vrwàcha in da Harza,
Sàmt-Stemma voll Fraïd,
rücha Nàcht-Stemma voll Schmarza,
zàhllosa Stemma fer riafa, fer vrzähla,
fer bata, fer prediga, fer flüacha,
Stemma vu àlla Gschepfer,
Deyfel-Stemma üs dr Hell, Nàrra-Stemma,
kreschtàlna Angel-Stemma,
welda Diarer-Stemma, Stemma vum Wend, vum Meer,
a Walt- Symphonie wu üsm dunkla Ungrund wàchst,
a pràchtvolla Gottes-Müsik.
In dr Stella zwescha Nàcht un Tàg
heer i züa.
Poesie esch d wunderbàri Màcht
wu lieslig vrwàcht
in dr stellschta Nàcht.
Poesie esch ennra Sunna.
Si keimt un wàchst üs unsrer Dunkelheit.
Poesie esch Morgarot.
Poesie well wecka
un d Menscha met Liacht ernähra.
D Vegel zwetschra àm Morga un riafa:
kumm met uns,
mr tànza im Summerhemmel,
mr tànza un senga in dr hocha, reina Herrlichkeit
gànz nooch vu da Angel.
Poesie ben i.
Ech seng met da Vegel.
Ech fliag met ehna in dr flümalichta Luft
hoch ewer da Dacher un da Baïm.
O fliaga, o kreisa im Liacht so hoch,
so ekstàtisch gànz nooch vu da Angel.
D Werter sen Flegel, freïa, lichta Flegel
im Wend vu dr heiliga Begeischterung.
Poesie ben i.
Ech seng s Lawa,
s diafa Liad vum Lawa,
nawelgràï un
fierrot,
s Liad vum
Lawa un vum Tod,
s Liad vu dr
heimliga Arda blàï un rund
un vum unheimliga fenschtra Abgrund.
Ech seng dr Psàlm vu dr Liawa.
O d Liawa wia Sunna, wia Fier,
wia wàrma Wulla, wia frescha Tàï.
Ech seng d Liawa met Blüamawerter.
Ech seng dr Mànn,
ech seng d Fràï,
ech seng s Kend.
O Gsechter, Gsechter vu da Menscha, rätselhàft,
Gsechter un Fràtza,
s Làcha, s Hiela vu da Menscha,
un d Fraïd
un d’Angscht un dr Wüat
un d Hoffnung wu emmer weder ufbliahït üs dr Vrloraheit.
Ech seng s Lawa, s Menscha-Lawa
so heimlig, so làngwilig, so kurz, su wundervoll, so tràgisch,
a Bletz im geheimnisvolla Abgrund vu dr Walt.
Met unsra àrma, stolpriga Werter,
met unsrer growa Büra-Sproch,
seng i d Walt
un spàziar gànz froh
duch Stàdt un Fald.
Ech ben dert, ech ben do,
ech ben dr Storck in dr Luft.
Ech ben dr heitra Hemmel un dr Duft
vu da Rosa un dr Wurm unterm Stei.
Poesie ben i.
Ech seng met dr gànza Schepfung eins,
met da blenzenda Starna,
Blüascht üs dr Fenschternis,
met dr nawliga Farna,
met dem Mond Goldsechel wu Vrsteckernis
speelt henter da Wulka.
Ech seng met dm tràïmenda Wàsser,
met da Pflànza grian Fascht vu dr Nàtür,
met da Diarer voll stummes Stühna.
Poesie ben i,
diafes Speela met dr Sproch,
Brot un Wie fer d Seela,
Vrklärung fer dr Geischt
Un zàrta Müsik fer dr Kerwer.
Poesie ben i, Dechtung ohna And.
Dechta, dechta,
ewigi Sehnsucht im Harz,
ewiger Schmarz,
dunkli Arwet.
Dechta bis in dr Wàhnsenn,
bis in dr Tod,
bis in d Hell,
unandlig dechta
bis in dr Hemmel,
ewiger Gottesdianscht.
TIEFES LIED VOM LEBEN
Die Erde schläft,
die Menschen schlafen,
schwarzer, bleischwerer Schlaf.
Sprachlos vegetieren wir
Jetzt erwache, Erde,
erwache, Mensch.
Stehen Sie auf, Poeten, Dichter aus der Heimat
und empfangt das Wort.
Hören Sie zu!
Die Wörter singen wie Vögelein im Frühjahr.
Die Wörter blühen auf wie Blumen.
Erwache, Muttersprache, tiefe Erdensprache.
Frisch, grün Gras ist das elsassische Reden.
Steht auf, Kinder der Heimat, Blumenkinder, Sonnenkinder,
und singt und tanzt fröhlich im Morgenlicht.
Tausende von Stimmen erwachen in den Herzen,
Samt-Stimmen voll Freude,
raue Nacht-Stimmen voll Schmerzen,
zahllosen Stimmen für rufen, für erzählen,
für beten, für predigen, für fluchen,
Stimmen von allen Geschöpfe
Teufel-Stimmen aus der Hölle, Narren-Stimmen,
kristalene Engel- Stimmen,
wilde Tiere-Stimmen, Stimmen vom Wind, vom Meer,
eine Welt-Synfonie die aus dem dunklen Ungrund wachst,
eine prachtvolle Gottes-Musik.
In der Stille zwischen Nacht und Tag
höre isch zu.
Poesie ist die wunderbare Macht
die leise erwacht
in der stillsten Nacht.
Poesie ist eine innere Sonne.
Sie keimt und wachst aus unserer Dunkelheit.
Poesie ist Morgenrot.
Poesie will erwecken
und die Menschen mit Licht ernähren.
Die Vögel zwitschern am Morgen und rufe:
komm mit uns,
wir tanzen im Sommerhimmel,
wir tanzen und singen in der hochen, reinen Herrlichkeit,
ganz nahe von den Engeln.
Poesie bin ich.
Ich singe mit den Vögeln.
Ich fliege mit ihnen in der flaumleichten Luft
hoch über den Dächern und den Bäumen.
O fliegen, o kreisen im Licht so hoch,
so ekstatisch, ganz nahe von den Engeln.
Die Wörter sind Flügel, freie, leichte Flügel
im Winde heiliger Begeisterung.
Poesie bin ich.
Ich singe das Leben,
das tiefe Lied vom Leben,
nebelgrau und feuerrot,
das Lied vom Leben und vom Tod,
das Lied von der heimligen Erde blau und rund
und vom unheimligen finsteren Abgrund.
Ich singe den Psalm vom Leben.
O die Liebe wie Sonne, wie Feuer,
wie warme Wolle, wie frischer Tau.
Ich singe die Liebe mit Blumenwörter.
Ich singe den Mann.
Ich singe die Frau.
Ich singe das Kind.
O Gesichter, Gesichter der Menschen, rätselhaft
Gesichter und Fratzen
Mit unseren armen stolprigen Wörter,
mit unserer groben Bauer-Sprache,
singe ich die Welt
und spaziere ganz froh
durch Stadt und Feld.
Ich bin dort, ich bin da,
ich bin der Storck in der Luft.
Ich bin der heitere Himmel und der Duft
der Rosen und der Wurm unterm Stein.
Poesie bin ich .
Ich singe mit der ganzen Schöpfung eins,
mit den blinzelnden Sternen,
Blüte aus der Finsternis,
mit den nebeligen Fernen,
mit dem Mond Goldsichel die Versteckernis
spielt hinter den Wolken,
mit den Pflanzen grünes Fest der Natur,
mit den Tieren voll stummes Staunen.
Poesie bin ich,
tiefes Spiel mit der Sprache.
Brot und Wein für die Seele
Verklärung für den Geist
und zarte Musik für den Körper.
Poesie bin isch, Dichtung ohne End.
Dichten, dichten,
ewige Sehnsucht im Herz,
ewiger Schmerz,
dunkle Arbeit.
Dichten, dichten bis in den Wahnsinn,
bis in den Tod,
bis in die Hölle,
unendlich dichten,
bis in den Himmel,
ewiger Gottesdienst.
TIEFES LIED VOM LEBEN
Die Erde schläft,
die Menschen schlafen,
schwarzer, bleischwerer Schlaf.
Sprachlos vegetieren wir
Jetzt erwache, Erde,
erwache, Mensch.
Stehen Sie auf, Poeten, Dichter aus der Heimat
und empfangt das Wort.
Hören Sie zu!
Die Wörter singen wie Vögelein im Frühjahr.
Die Wörter blühen auf wie Blumen.
Erwache, Muttersprache, tiefe Erdensprache.
Frisch, grün Gras ist das elsassische Reden.
Steht auf, Kinder der Heimat, Blumenkinder, Sonnenkinder,
und singt und tanzt fröhlich im Morgenlicht.
Tausende von Stimmen erwachen in den Herzen,
Samt-Stimmen voll Freude,
raue Nacht-Stimmen voll Schmerzen,
zahllosen Stimmen für rufen, für erzählen,
für beten, für predigen, für fluchen,
Stimmen von allen Geschöpfe
Teufel-Stimmen aus der Hölle, Narren-Stimmen,
kristalene Engel- Stimmen,
wilde Tiere-Stimmen, Stimmen vom Wind, vom Meer,
eine Welt-Synfonie die aus dem dunklen Ungrund wachst,
eine prachtvolle Gottes-Musik.
In der Stille zwischen Nacht und Tag
höre isch zu.
Poesie ist die wunderbare Macht
die leise erwacht
in der stillsten Nacht.
Poesie ist eine innere Sonne.
Sie keimt und wachst aus unserer Dunkelheit.
Poesie ist Morgenrot.
Poesie will erwecken
und die Menschen mit Licht ernähren.
Die Vögel zwitschern am Morgen und rufe:
komm mit uns,
wir tanzen im Sommerhimmel,
wir tanzen und singen in der hochen, reinen Herrlichkeit,
ganz nahe von den Engeln.
Poesie bin ich.
Ich singe mit den Vögeln.
Ich fliege mit ihnen in der flaumleichten Luft
hoch über den Dächern und den Bäumen.
O fliegen, o kreisen im Licht so hoch,
so ekstatisch, ganz nahe von den Engeln.
Die Wörter sind Flügel, freie, leichte Flügel
im Winde heiliger Begeisterung.
Poesie bin ich.
Ich singe das Leben,
das tiefe Lied vom Leben,
nebelgrau und feuerrot,
das Lied vom Leben und vom Tod,
das Lied von der heimligen Erde blau und rund
und vom unheimligen finsteren Abgrund.
Ich singe den Psalm vom Leben.
O die Liebe wie Sonne, wie Feuer,
wie warme Wolle, wie frischer Tau.
Ich singe die Liebe mit Blumenwörter.
Ich singe den Mann.
Ich singe die Frau.
Ich singe das Kind.
O Gesichter, Gesichter der Menschen, rätselhaft
Gesichter und Fratzen
Mit unseren armen stolprigen Wörter,
mit unserer groben Bauer-Sprache,
singe ich die Welt
und spaziere ganz froh
durch Stadt und Feld.
Ich bin dort, ich bin da,
ich bin der Storck in der Luft.
Ich bin der heitere Himmel und der Duft
der Rosen und der Wurm unterm Stein.
Poesie bin ich .
Ich singe mit der ganzen Schöpfung eins,
mit den blinzelnden Sternen,
Blüte aus der Finsternis,
mit den nebeligen Fernen,
mit dem Mond Goldsichel die Versteckernis
spielt hinter den Wolken,
mit den Pflanzen grünes Fest der Natur,
mit den Tieren voll stummes Staunen.
Poesie bin ich,
tiefes Spiel mit der Sprache.
Brot und Wein für die Seele
Verklärung für den Geist
und zarte Musik für den Körper.
Poesie bin isch, Dichtung ohne End.
Dichten, dichten,
ewige Sehnsucht im Herz,
ewiger Schmerz,
dunkle Arbeit.
Dichten, dichten bis in den Wahnsinn,
bis in den Tod,
bis in die Hölle,
unendlich dichten,
bis in den Himmel,
ewiger Gottesdienst.
LE CHANT
PROFOND DE LA VIE
La terre
hiberne.
Les humains
sommeillent.
Sombre
sommeil de plomb.
Sans langue
nous végétons,
mutiques,
mutiques, délaissés par Dieu.
Éveille-toi,
Terre !
Éveillez-vous,
êtres humains !
Levez-vous,
poètes, bardes du pays proche,
et
accueillez le Verbe !
Écoutez !
Les mots
chantent comme oisillons au printemps.
Les mots
s’épanouissent comme des fleurs.
Éveille-toi,
Langue maternelle, profonde langue du terroir !
Herbe
fraîche, herbe verte est le Parler alsacien.
Levez-vous,
enfants du pays, enfants-fleurs, enfants-soleil,
et chantez
et dansez joyeusement dans la lumière du matin.
Mille voix
s’éveillent dans les cœurs,
voix
soyeuses pleines de joie,
âpres voix
nocturnes transies de souffrance,
innombrables
voix pour appeler, pour raconter,
pour prier,
pour prêcher, pour blaspémer,
voix de
toutes les créatures,
diaboliques
voix d’enfer, voix de fous,
cristallines
voix d’anges,
voix d’animaux
sauvages, voix du vent, voix de la mer,
une
symphonie universelle qui émerge du sombre sans-fond,
une
magnifique musique de Dieu.
Dans le
silence entre nuit et jour,
je suis à
l’écoute.
Poésie est
splendide puissance
qui
doucement s’éveille
en la nuit
la plus silencieuse.
Poésie est
soleil intérieur.
Elle germe
et pousse du fond de notre obscurité.
Poésie est
aurore.
Poésie veut
éveiller
et nourrir
les êtres de lumière.
Les oiseaux
pépient le matin et appellent :
« Viens
avec nous !
Nous dansons
dans le ciel d’été,
nous dansons
et chantons dans la haute, la pure splendeur
tout près
des anges.
Les mots
sont des ailes, des ailes libres, légères
dans le vent
du saint enthousiasme.
Je suis
Poésie.
Je chante la
vie,
le chant
profond de la vie,
grisaille nébuleuse
et rougeur de feu,
chant de la
vie et de la mort,
chant de la
terre familière bleue et ronde
et de
l’abîme ténébreux et effrayant.
Je chante le
psaume de l’amour.
Ô l’amour
comme soleil, comme feu,
comme laine
chaude et rosée fraiche.
Je chante l’amour
avec des mots-fleurs.
Je chante
l’homme,
je chante la
femme,
je chante
l’enfant.
Ô les
visages, les visages des humains, énigmatiques,
visages et
faces grimaçantes,
rires et
pleurs des humains,
et la joie
et la peur et la colère,
et
l’espérance qui toujours refleurit du fond de la perdition.
Je chante la
vie, la vie humaine
si
familière, si ennuyeuse, si brève, si merveilleuse, si tragique,
un éclair
dans l’abîme mystérieux de l’univers.
Avec nos
pauvres mots trébuchants,
avec notre
rude parler paysan,
je chante le
monde
et me
promène tout joyeux
à travers
villes et campagnes.
Je suis
là-bas, je suis ici,
je suis la
cigogne dans l’air.
Je suis le
ciel limpide et le parfum
de la rose
et le vers de terre sous la pierre.
Je suis
Poésie.
Je chante à
l’unisson avec toute la Création,
avec les
étoiles clignotantes,
floraison
des ténèbres,
avec les
nébuleux lointains,
avec la
lune, faucille d’or qui joue à cache-cache
derrière les
nuages.
Je chante
avec les eaux rêveuses,
avec les
plantes fête verte de la nature,
avec les
animaux remplis de muette stupéfaction.
Je suis
Poésie,
jeu profond
avec la langue,
pain et vin
pour l’âme,
transfiguration
pour l’esprit
et tendre
musique pour le corps.
Je suis
Poésie, vie poétique sans fin.
Poésie,
poésie, éternelle nostalgie au fond du cœur,
éternel
douloir,
sombre
labeur.
Poésie
jusqu’à la folie,
jusqu’à la
mort,
jusqu’en
enfer,
poétiser
sans fin
jusque dans
le ciel,
éternel
service divin.
LITURGIE DU SILENCE
Faire silence pour écouter le silence, le dire profus du
silence.
Taire le vacarme incessant des pensées, vampire mental qui
dévore au dedans.
Faire silence. Doucement,
graduellement, sans effort, mourant à tout effort, toute crispation, toute
volonté propre.
Et s'abreuver, se nourrir de silence.
N'être plus qu'oreille, attention intense au chuchotement
des choses.
Boire, boire à la source
profonde, à la source la plus profonde, infiniment profonde. Originelle.
Matricielle.
Faire silence. Lentement, patiemment s'ouvrir, s'offrir.
N'être plus qu'ardente humble
attention, plus que pure ouïe de l'infini murmure.
Le silence parle. Avec des
murmures, des babils, des gazouillis, des balbutiements. Clameur muette à
l'adresse des humains qui ont des oreilles, mais qui n'entendent pas.
Le silence chante, bruissant
comme soie, comme blé ployé par brise, moires murmurantes.
Le silence chante, s'ouvrant,
s'amplifiant, vaste psaume, s'affinant porcelaine, fluide lave de fraîcheur.
Le silence chante, vastitude océanique précieuse comme une
perle.
Le silence chante, grandiloquence
de voie lactée et discrétion, fragilité d'élytre de libellule.
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