REQUIEM
EUROPEEN
Ils s’étendent à travers toute l’Europe, les cimetières
militaires, champs infinis de tombes des multitudes de soldats morts dans la
géhenne guerrière, champs de paix après les sanglants champs de bataille, paix
de Dieu ou paix de l’oubli de la folie humaine en attendant la prochaine chute
calamiteuse au fond de l’horreur démentielle.
Ils dorment,
les guerriers de jadis, les combattants des Guerres mondiales, de la Guerre de
trente ans, de la Guerre de cent ans.
Ils dorment profondément, les Français, les Allemands, les
Anglais, les Italiens, les Russes, les Américains, les Africains, soldats
oubliés, soldats inconnus de toutes les guerres.
Ils dorment d’un lourd sommeil dans la terre d’Europe, les
millions de jeunes hommes sacrifiés, la jeunesse massacrée de partout.
REQUIEM AETERNAM DONA EIS, DOMINE.
Seigneur, donne-leur le repos éternel.
Maintenant les peuples en ont assez avec les hurlements
barbares, avec les sempiternelles tueries sans merci, avec les amas de ruines
désolées et les amoncellements de cadavres de l’Histoire mondiale, Hystérie
planétaire insensée, Loi de meurtre.
Ils en ont assez, les peuples, avec les jours de rage et les
jours d’abîme.
DIES IRAE, DIES ILLA.
Des enfants jonchent les fosses communes de roses blanches.
Des adolescents de plusieurs nations chantent des chorals et
puis s’enlacent pacifiquement.
Une voix s’élève dans le silence: « Europe, Europe,
n’oublie jamais ton immense folie millénaire, tes péchés monstrueux, n’oublie
jamais les millions de morts absurdes, les destructions catastrophiques.
N’oublie jamais ces temps de terreur, de douleur, de massacre, ces jours
d’apocalypse. »
Non, plus jamais la guerre, plus jamais la guerre !
s’exclament les enfants de toutes les nations d’Europe, plus jamais l’enfer sur
terre !
Des armées de morts sortent des tombes la nuit et émettent
des clameurs muettes à travers le vaste abattoir Europe, de l’Atlantique
jusqu’à l’Oural, continent du Désastre, tragique patrie commune.
Les spectres des morts font entendre longuement de lugubres
gémissements sous la lune livide.
REQUIESCANT IN PACE !
Seigneur, laisse les reposer en paix !
EUROPÄISCHES
REQUIEM
Sie strecken sich aus, die Soldatenfriedhöfe, über ganz
Europa,
unendliche Felder mit den Gräber der unzähligen Gefallenen,
Friedenfelder nach den
blutigen Schlachtfelder,
Frieden Gottes oder Frieden des Vergessens
des menschlichen
Wahnsinns bis zum nächsten Sündenfall.
Sie schlafen, die Krieger von damals, die Helden
der Weltkriege, des dreissigjährigen Kriegs, des
hundertjährigen Kriegs.
Sie schlafen tief, die
Deutschen, die Franzosen, die Engländer,
die Italiener, die Russen, die Amerikaner, die Afrikaner, die
vergessene Soldaten aller Kriege.
In der Erde Europas schlafen sie, die Millionen von
geopferten jungen Menschen,
die geschlachtete Jugend von überall.
REQIEM AETERNAM DONA EIS, DOMINE ! HERR, GIB IHNEN DIE
EWIGE RUHE !
Satt haben jetzt die Völker mit dem Brüllen der Barbaren,
mit dem ewigen heillosen Morden,
mit den seelenlosen Trümmerhaufen und Leichenhaufen der
Weltgeschichte.
Satt haben die Völker
mit den Tagen des Zorns, mit den Tagen des Wehens.
DIES IRAE, DIES ILLA.
Kinder streuen weisse Rosen über die Massengräber.
Jungen singen Choräle und umarmen sich.
Eine Stimme spricht aus der Stille : Europa, Europa,
vergiss nie
deinen alten tausenjährigen Wahnsinn, deine ungeheuren
Sünden,
vergiss nie die Millionen von niedergemetzelten Menschen, die
sinnlosen Zerstörungen.
Vergiss nie : es war Schrecken, Schmerz, Sterben ; es
war Apokalypse.
Nein, nie wieder Krieg, nie wieder Krieg ! rufen die
Kinder aller Nationen Europas,
nie wieder teuflischer Wahn, höllischer Horror, nie wieder
die Hölle auf Erden!
Armeen von Toten stossen stumme Schreien aus über den
endlosen Schlachthof Europa
vom Atlantik bis zum
Ural, Kontinent des Übels, gemeinsames Vaterland.
Die Gespenster der Toten stöhnen und heulen in der Finsternis
underm bleichen Mond.
REQUIESCANT
IN PACE !
O HERR,
LASSE SIE RUHEN IN FRIEDEN !