12.9.15

LABYRINTHE DES JOURS 1992



1992
           
8.3. Mes manques : l'humour, la distance ironique, l'auto-dérision, le comique, la finesse de l'esprit, la légèreté, la souplesse du style, le sens de la nuance, la sociabilité souriante, le sens de l'accueil, l'aisance de l'expression orale...

Ne pas croire, c'est ne pas croire assez à la Vie. C'est croire à la fin au Néant. L'aut-aut : croire à la Vie ou croire à la Mort?

La question posée à chacun : désires-tu l'infini, Ou te contentes-tu du fini?
L'agnostique, lui, vient avec son "je ne sais pas". Comment ? Tu ne sais pas si tu veux vivre?
A vrai dire, tu veux échapper à la question. Tu ne veux pas te prononcer. Mais on ne peut pas ne pas se prononcer.
De quelque façon, tout existant se prononce, manifeste par ses conduites de quel côté il penche, du côté du fini ou du côté de l'infini.
L'agnostique voudrait gagner sur les deux plans, mais en fait reste souvent trop englué dans le fini (sans éliminer intellectuellement la question de l'infini).

29.3. XXe s. La première moitié du siècle délire en tous les sens; la seconde ne cesse de ruminer la première moitié.
En politique, on ressasse sans fin les traumatismes de l'ère communiste et de l'ère fasciste. En art on regurgite sans fin les révolutions esthétiques du début du siècle : Duchamp, Picasso, Schoenberg, Kandinsky, Joyce, Breton.
En science, nous continuons à assimiler les ruptures épistémologiques : Einstein, Planck.
Nous avons du mal à sortir du XX° s. qui lui-même n'est que la terminaison des Temps Modernes...

Nous avons du mal à changer d'ère (d'air) en dépit de toutes les annonces de Wende, de ruptures, de révolution qui parsèment notre temps.

Le dire est toujours en quête de l'Indicible. L'Indicible est le coeur du Dire.

Je suis un être nul au plan humain. Je ne peux atteindre un peu de vraie substance que par le truchement de l'Art et de la pensée. Ma nullité humaine m'épargne de me pavaner sur les tréteaux des vanités humaines. C'est un grand avantage. Ma nullité me protège de la médiocrité! Je n'ai le choix qu'entre la chute dans le néant et l'aspiration à la vraie grandeur.

La Voie. À la fin n'être plus que désir, pure soif. Heureux les assoiffés... Heureux les affamés... Heureux les pauvres en esprit (ceux qui n'idolifient rien). 

28.7. Tu cherches toujours à retrouver le sentiment de bonheur. Mais le bonheur est chose illusoire pour toi. Tu sais bien que tu es piégé, que l'inguérissable blessure finira toujours par se rouvrir.
Tu ne peux fonder ton être que sur la connaissance de l'épine fichée dans ta chair, sur ton essentielle incapacité de vivre comme tout le monde.
Tu as été exilé hors du chemin ordinaire et tu le resteras pour toujours.

Ton seul salut : écrire, écrire ta vérité. Pénétrer l'énigme de ta vie en écrivant, en transmuant ton malheur en beauté.

Claude Miller (La meilleure façon de marcher), avec Dewaere.

29.7. Ne laisser derrière moi que de l'essentiel. Gros travail pour élaguer la matière de ma vie.

Espace. Le sentiment d'un contenant. Le sentiment d'être DANS l'espace. Cette idée est une projection. Nous ne sommes pas dans l'espace ; nous sommes l'espace ; nous sommes espace, ouverture.
Même chose pour le temps. Nous croyons être dans le temps, dans la ligne temporelle. À vrai dire, nous sommes temps, devenir ouvert. Nous sommes le Jeu et non dans le Jeu. Pas de monde. L'uni-vers n'existe pas.

15.10. Travail avec H sur un texte de Brecht (Herr Egge).

2.11.
Transfigurer mon existence ratée en poésie.




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