AVANT-JEU
Pentecôte. En ce jour de la venue de l'Esprit, ouvrons le HAUT JEU, le Jeu de Poésie.
La Poésie est l'incarnation multiforme du Souffle dans les langues humaines.
Réinventons l'inspiration. Par-delà la mort de la Poésie.
« LE POÈTE EST LA PARTIE DE L'HOMME RÉFRACTAIRE AU PROJET CALCULE » (RENÉ CHAR).
Poésie : parole
première, dire-vie, dire monde.
Poésie : expérience du non-saisir,
du laisser-venir, du laisser-advenir.
Naître parole à
travers le silence sans mesure, stellaire.
Wörter wie Steine, wie
Blitze, nackte Wörter die aus der Nacht, aus der Stille tauchen.
La poésie, la musique
soulignent le silence; elles ne le comblent pas.
Dire toujours neuf, chant éternellement
inouï.
Poésie : exercice incessant de
recréation du monde, exercice de jeunesse, de nouveauté, toujours
recommencé.
Tentative d’exprimer la nostalgie
inexprimable de l’âme humaine.
Tentative folle de dire l'indicible.
"POESIE. IMAGES ET MOTS QUI REFLETENT L'ETAT SANS IMAGES ET SANS MOTS.
MUSIQUE. SONS QUI REFLETENT L'ETAT SANS SONS. MOTS ET SONS EQUIVALENTS AU
SILENCE." (SIMONE WEIL)
La poésie est un acte de foi, un cri
dans le vide abyssal du monde.
Désir le plus profond : vivre
l’absolue poésie, l’écriture-lumière, l’écriture-feu, l’écriture-ténèbres.
Frères en poésie : Novalis,
Hoelderlin, Baudelaire, Rimbaud, Trakl, Artaud, Celan…
N'être plus que poésie, jeu entier de ténèbres et de lumière, à travers toutes les sensations, tous les sentiments, toutes les formes, toutes les tonalités, tous les langages.
N'être plus qu’entier Dire-Vie.
Chant pluriel de la
vie mettant en œuvre tout le registre verbal.
De véhicule des
banalités courantes, des certitudes ordinaires, le langage se mue en milieu
sacré, toujours en déséquilibre, irradiant, sans lieu, sans repos, pur espace
poïétique.
Chant profond, CANTE JONDO, diafes Liad vum Lawa, tiefes Lied vom Leben.
Dire l'existence à la fois humble et grandiose. Balbutier, murmurer, chanter, crier le mystère de l'existence, l'ardente inconnaissance.
LIVRE DE LEGENDE
ROUGE LA GUERRE
PARFOIS UN OISEAU
TRAVERSE LE CIEL ET SE PERD
DANS LES IMMENSITES OBSCURES
Rois rauques hélant les aigles sur les rochers.
Rouge la guerre dans la plaine.
Cités éventrées brûlant dans le soir.
Les armées s'assoupissent derrière les brouillards.
Parfois un oiseau traverse le ciel silencieux et se perd dans les immensités obscures au-delà des forêts.
Rois rauques hélant les aigles sur les rochers.
Rouge la guerre dans la plaine.
Cités éventrées brûlant dans le soir.
Les armées s'assoupissent derrière les brouillards.
Parfois un oiseau traverse le ciel silencieux et se perd dans les immensités obscures au-delà des forêts.
SALUEZ LES ROIS GRANDS INSECTES NOIRS
Saluez les rois
qui avancent parmi les feux,
grands insectes noirs
que la soif et la guerre mènent aux confins de l'Empire.
Saluez les subtils animaux vêtus de lumière
qui délaissent les tombeaux,
arrosant de sang l'argile,
renversant les arcs,
comblant les douves.
Les chemins de l'énigme s'ouvrent la nuit sous leurs pas.
Les fumées se balancent au-dessus des chevelures rouges
tandis que dansent les vierges peintes de vert.
Les herbes montent à l'assaut des lits
et les rivières naissent au milieu des ventres ouverts,
grands flots d'oiseaux sombres et de reptiles.
A l'horizon se taisent les nuages.
Solitude désolée du vieillard assis sur un banc
devant la fenêtre de la maison déserte:
rien ne subsiste des étés fertiles, rien des visages aimés que cendre.
Et la cavalerie barbare gagne les bois
où la nuit broute les fraises,
frangeant de rêves la rage des soldats.
Les rois passent sur leurs nuées d'or
voguant vers l'Asie.
Les décombres s'accumulent parmi les neiges,
les branches brisées,
le royaume grouillant des fourmis que l'ouragan soulève
et plaque contre le firmament.
INVASIONS
Les rois avancent parmi les feux,
Les rois avancent parmi les feux,
hauts
insectes noirs,
subtils animaux vêtus de sang;
subtils animaux vêtus de sang;
les fumées se
balancent
au-dessus de leurs chevelures rouges
au-dessus de leurs chevelures rouges
tandis que dansent
les guerriers peints de vert.
Les flores de carnage montent à l'assaut des lits
et des rivières hallucinées jaillissent des ventres ouverts,
amples flots d'oiseaux sombres et de reptiles.
Les décombres s'accumulent sous la neige.
les guerriers peints de vert.
Les flores de carnage montent à l'assaut des lits
et des rivières hallucinées jaillissent des ventres ouverts,
amples flots d'oiseaux sombres et de reptiles.
Les décombres s'accumulent sous la neige.
Fourmis
monstrueuses
que le vent soulève et plaque contre
le ventre des femmes et le firmament.
le ventre des femmes et le firmament.
Gloire des reines d'Aorasie
tempêtes de lumière sur les têtes couronnées
et nuit sur les sexes nuit profonde sur les ventres
de royale chair gloire aux cuisses fortes
des filles d'Aorasie et ténèbres sur les entrailles
ardentes ténèbres sur la faim obscène des reines de délire
elles avancent nues sur les terrasses
s'offrant à la morsure féroce du soleil
Les psaumes de neige exultent dans la nudité
des nuits d'Eustrie contrées de foudre hosannah!
Les rois crucifiés prophétisent
étendant leurs feuillages de feu jusqu'aux Mongolies.
Au lieu dit du crâne de tendres brises frôlent les crucifiés
et dispersent les neumes au-dessus des pâtures de Judée.
Couronnée des tempêtes de glycines la vulve d'abîme
jubile d'astres par-delà les portiques d'Aorasie.
La graisse des nébuleuses sperme des dieux remue
imperceptiblement dans la grande vulve ointe de miel.
PEREGRINATIONS DANS LE DECLIN DES EMPIRES
Les chevaux de la mer traversent
étincelants
la douloureuse nébuleuse des obsessions.
O pérégrinations dans le déclin des
empires.
Prostrations à l’extrémité des
continents et des âges.
De grandes convoitises de lumière
attirent
les bêtes près des golfes aux cyprès de
flammes.
Mais nous, exténués, éteignons nos
astres
BOURDONNANTE D'ABEILLES BELLE COMME LA MORT
Il y a la mer.
Il y a la mort aux seins nus.
Et la lumière qui chaque jour est vierge.
Les châteaux ont la paresse des éternités et la fraîcheur ombreuse des chants.
Dedans se promène nue celle qui naquit près de vagues.
Insaisissable fille aux diamants d'angoisse, bourdonnante d'abeilles,
belle comme la mort aux jardins de glaïeuls.
Les dieux boivent ses regards.
Les morts la caressent sous les branches.
Tu es la reine des mers et des îles.
Tu es celle qui monte des roseraies
vers les cimes sauvages où niche l'aigle,
celle qui plonge dans l'ode des constellations,
celle que les guerres traversent et qui, indemne,
resplendit au sommet des falaises,
poussière glorieuse où nagent les goélands...
PSAUME 89
Voici le psaume montant des entrailles du temps,
le psaume des peuples en marche
et des éclatements.
Rouges noirs les jours de rage,
les jours de gloire,
et bleus l'été la liberté,
bleus les yeux de la liberté,
l'azur ivre au-dessus des champs de blé
et la mer la mer
immensément lumière.
Blanche l'éternité,
la neige paisible sur les hameaux de France.
Blanche l'attente séculaire,
l'éternelle éternellement muette attente dans les chaumières
du grand jour de délivrance.
Bleus le rêve l'utopie le ciel sur la terre,
bleu le paradis îles ô îles d'innocence par-delà la mer,
pays de cocagne ou Atlantide.
Voici le psaume des profondeurs,
le chant de l'indestructible Espérance.
Rouges noirs soudain et bleus et blancs
les jours de France.
Clameur rauque démoniaque
remplissant le ciel, millions d'ailes
se trempant dans les flaques
du nouveau matin
et s'envolant parmi les danses
et les rires cristallins.
Voici le sombre chant le cantique irradiant
de la sainte véhémence.
BLANCHE NOIRE
L'HORREUR
blancs les éclairs
noir l'orage tourbillonnant
autour des demeures féodales
les éclairs frappent
les bêtes trempées qui s'échappent
écroulement des hauts portails d'ombre
les pierres mordues par le feu du ciel
crient
tandis que les manants en furie
violent les servantes
dans les cuisines les écuries
blêmes bleus les éclairs brûlant la neige
de chairs suppliciées
laiteuses les flaques de sperme moiré
et rouge sombre les flaques de sang
blanche noire l'horreur
dans le luxe des vastes salles
on crucifie le seigneur
on lui crève les yeux
noires pourpres les clameurs
que répercute le dédale des souterrains
blancs les éclairs
noir l'orage tourbillonnant
autour des demeures féodales
les éclairs frappent
les bêtes trempées qui s'échappent
écroulement des hauts portails d'ombre
les pierres mordues par le feu du ciel
crient
tandis que les manants en furie
violent les servantes
dans les cuisines les écuries
blêmes bleus les éclairs brûlant la neige
de chairs suppliciées
laiteuses les flaques de sperme moiré
et rouge sombre les flaques de sang
blanche noire l'horreur
dans le luxe des vastes salles
on crucifie le seigneur
on lui crève les yeux
noires pourpres les clameurs
que répercute le dédale des souterrains
ELSASSISCHER
GOLGOTHA
Jetz steht dr
Barg met sim hocha Kritz ewer d Ewena.
Jetz esch
Stella, unandligi Stella ewerem Barg.
A Stella wia na
verstummter Schreï vu doïsiga Geopferta,
a roter,
schwàrzer Schreï wu üsm Blüatbarg brialt, üsm dunkla Harz vu dr Arda.
Jetz steht dr
Barg in dr riawiga Stella,
dr Barg met dr verwundeta Nàtür,
dr Barg vum
vruckta Morda, vum Schrecka, vum Hunger, vum Durscht,
dr Barg vum Schmarz un vum Tod.
Ja, do owa han
se sech gschlàchta wia welda Tiarer
in da Schetzagrawa, in da Lecher, im Drack, in
dorniger Weldnis un Stàcheldroht.
In Nàcht un Nawel, im Raga, im Schnee, under
isiga Sterna un brennenda Hemmel,
han si gekampft, wia Gschpanschter, d
gehelmta, gestefelda Soldàta,
met Flenda, Grànàta, Baïonnetta, Masser.
In da Unterstand
han se sech verkrocha
underm heftiga
Trummel-Fier vu da Kànona.
Do owa verlora
in dr Hell han si gwàrta uf Erlesung vum
unmenschliga Ewel.
Si han gwàrta uf
Freeda oder Verdàmnis. Gwàrta han si un verzwiefelt.
Do owa ufm buckliga Gepfel esch si gekritzigt wora,
d Jugend üs Ditschlànd un Frànkrich.
Do owa ufm riesiga Totakopf üs Felsa un Wurzla
esch si verblüata, d flàmmenda Jugend.
Do esch si umgebrocht wora, do esch si gstorwa in Schlàmm un Fülnis,
in
Gottes Nàcht, ohna Gebat, ohna Psàlm, ohna Gnàda.
Jetz steht dr
Barg met sim hocha Kritz wu Chreschtüs fahlt.
Ufm elsassischa
Golgotha, in dr versprangta Fenschternis, in dr verressena Stella,
Esch Gottesdämmerung,
esch Walt-Untergàng gse.
Ufm elsassischa
Golgotha, under Stàhlgwetter, underm
blüatiga Hemmel,
esch Gott gstorwa.
GOLGOTHA
ALSACIEN
Maintenant
la montagne se dresse au-dessus de la plaine avec sa croix altière.
Maintenant
le silence, l’infini silence règne au-dessus de la montagne.
Un silence
comme la clameur muette de milliers de victimes, une clameur rouge, noire qui
hurle hors de la montagne de sang, hors des entrailles sombres de la terre.
Maintenant
la montagne se tient dans un calme paisible, la montagne meurtrie,
la montagne
de la folle tuerie, de la terreur, de la faim, de la soif, la montagne de la
souffrance et de la mort.
Oui là-haut
ils se sont massacrés comme des bêtes féroces dans les tranchées, dans les
trous, la fange, les ronces, les torsades de barbelés.
Entre nuit et brouillard, dans la pluie, dans la neige, sous
les constellations glaciales, sous les cieux brûlants, ils se sont battus
jusqu’à l’absurde, comme de sombres spectres d’horreur, les guerriers casqués,
bottés, avec fusils, grenades, baïonnettes, couteaux.
Ils se sont
terrés dans les souterrains sous le feu roulant des canons.
Perdus
là-haut en enfer ils attendaient d’être délivrés du Mal inhumain.
Ils
attendaient la paix ou la damnation insensée.
Ils ont
attendu et ils ont perdu l’espoir.
Là-haut sur
le sommet bossu, elle a été crucifiée, la jeunesse de France et d’Allemagne.
Là-haut sur
le crâne gigantesque de rocs et de racines, elle a versé son sang, la
flamboyante jeunesse d’Europe.
Là-haut elle a été systématiquement décimée, la génération
livrée à l’effroyable sacrifice; là-haut elle a péri dans la bourbe et la
pourriture, dans la nuit de Dieu, sans prière, sans psaume, sans grâce.
Maintenant
la montagne s’élève avec son immense croix sans Christ.
Sur le
Golgotha alsacien, dans les ténèbres fracassées, dans le silence lacéré, est
advenu le crépuscule de Dieu, l’apocalypse du monde.
Sur le Golgotha alsacien, parmi les orages d’acier, sous les
effroyables cieux de sang, Dieu est mort.
ELSÄSSISCHER
GOLGOTHA
Jetzt erhebt
sich der Berg mit seinem hochen Kreuz über der Ebene.
Jetzt ist
Stille, unendlige Stille über dem Berg.
Eine Stille
wie ein verstummter Schrei von tausenden
Geopferte, ein purpurner, schwarzer Schrei der aus dem Blutberg, aus dem
dunklen Herz der Erde brüllt.
Jetzt steht
der Berg in friedlicher Ruhe, der Berg mit der verwundenen Natur, der Berg des
verückten Mordens, des Schreckens, des Hungers, des Dursts, der Berg vom
Schmerz und vom Tod.
Ja, da oben
haben sie sich geschlachtet wie wilde Tiere in den Schützengraben, in den
Löcher, im Dreck, in dorniger Wildnis und Stacheldroht.
Zwischen
Nacht und Nebel, im Regen, im Schnee, unter eisigen Gestirne und brennenden Firmamente,
haben sie gekämpft wie dunklen Horror-Gespenster, bis ins Absurden, die
gehelmte, gestifelte Krieger, mit Flinten, Granaten, Bajonetten, Messer.
In den
Unterstände haben sie sich verkrochen unterm heftigen Trommelfeuer der Kanonen.
Dort oben
verloren in der Hölle haben sie gewartet auf Erlösung vom unmenschlichen Übel.
Sie haben gewartet auf Frieden oder unsinnige Verdammnis.
Gewartet
haben sie und verzweifelt.
Dort oben
auf dem buckligen Gipfel ist sie gekreuzigt worden die Jugend aus Frankreich
und Deutschland.
Dort oben auf dem riesigen Totenkopf aus Felsen und Wurzeln
ist sie verblutet, die flammende Jugend Europas. Dort ist sie umgebracht
worden, die Generation des ungeheuren Opfers ; dort ist sie verschwunden
in Schlamm und Fäulnis, in Gottes Nacht, ohne Gebet, ohne Psalm, ohne Gnade.
Jetzt steht
der Berg mit seinem mächtigen Kreuz wo Christus fehlt.
Auf dem
elsässischen Golgotha, in der versprengten Finsternis, in der verrissenen Stille, ist Gottesdämmerung,ist Weltuntergang
gewesen.
Auf dem
elsässischen Golgotha, unter Stahlgewitter, unter grauenvollem blutigem Himmel,
ist Gott
gestorben.
EUROPÄISCHES REQUIEM
Sie strecken sich aus, die
Soldatenfriedhöfe, über ganz Europa,
unendliche Felder mit den Gräber der
unzähligen Gefallenen,
Friedenfelder nach den blutigen
Schlachtfelder,
Frieden Gottes oder Frieden des
Vergessens
des menschlichen Wahnsinns bis zum nächsten
Sündenfall.
Sie schlafen, die Krieger von damals,
die Helden
der Weltkriege, des dreissigjährigen
Kriegs, des hundertjährigen Kriegs.
Sie schlafen tief, die Deutschen, die
Franzosen, die Engländer,
die Italiener, die Russen, die
Amerikaner, die Afrikaner, die vergessene Soldaten aller Kriege.
In der Erde Europas schlafen sie, die
Millionen von geopferten jungen Menschen,
die geschlachtete Jugend von überall.
REQIEM AETERNAM DONA EIS, DOMINE !
HERR, GIB IHNEN DIE EWIGE RUHE !
Satt haben jetzt die Völker mit dem
Brüllen der Barbaren,
mit dem ewigen heillosen Morden,
mit den seelenlosen Trümmerhaufen und
Leichenhaufen der Weltgeschichte.
Satt haben die Völker mit den Tagen des Zorns,
mit den Tagen des Wehens.
DIES IRAE, DIES ILLA.
Kinder streuen weisse Rosen über die
Massengräber.
Jungen singen Choräle und umarmen sich.
Eine Stimme spricht aus der
Stille : Europa, Europa, vergiss nie
deinen alten tausenjährigen Wahnsinn,
deine ungeheuren Sünden,
vergiss nie die Millionen von
niedergemetzelten Menschen, die sinnlosen Zerstörungen.
Vergiss nie : es war Schrecken,
Schmerz, Sterben ; es war Apokalypse.
Nein, nie wieder Krieg, nie wieder
Krieg ! rufen die Kinder aller Nationen Europas,
nie wieder teuflischer Wahn, höllischer
Horror, nie wieder die Hölle auf Erden!
Armeen von Toten stossen stumme Schreien
aus über den endlosen Schlachthof Europa
vom Atlantik bis zum Ural, Kontinent des
Übels, gemeinsames Vaterland.
Die Gespenster der Toten stöhnen und
heulen in der Finsternis underm bleichen Mond.
REQUIESCANT IN PACE !
O HERR, LASSE SIE RUHEN IN
FRIEDEN !
REQUIEM EUROPEEN
Ils s’étendent à
travers toute l’Europe, les cimetières militaires, champs infinis de tombes des
multitudes de soldats morts dans la géhenne guerrière, champs de paix après les
sanglants champs de bataille, paix de Dieu ou paix de l’oubli de la folie
humaine en attendant la prochaine chute calamiteuse au fond de l’horreur
démentielle.
Ils dorment
profondément, les Français, les Allemands, les Anglais, les Italiens, les
Russes, les Américains, les Africains, soldats oubliés, soldats inconnus de
toutes les guerres.
Ils dorment d’un lourd
sommeil dans la terre d’Europe, les millions de jeunes hommes sacrifiés, la
jeunesse massacrée de partout.
REQUIEM AETERNAM DONA EIS, DOMINE.
Seigneur, donne-leur
le repos éternel.
Ils en ont assez, les
peuples, avec les jours de rage et les jours d’abîme.
DIES IRAE, DIES ILLA.
Des enfants jonchent
les fosses communes de pétales de roses blanches.
Des adolescents de
plusieurs nations chantent des chorals et puis s’enlacent pacifiquement.
Une voix s’élève dans
le silence: « Europe, Europe, n’oublie jamais ton immense folie
millénaire, tes péchés monstrueux, n’oublie jamais les millions de morts
absurdes, les destructions catastrophiques. N’oublie jamais ces temps de
terreur, de douleur, de massacre, ces jours d’apocalypse. »
Non, plus jamais la
guerre, plus jamais la guerre ! s’exclament les enfants de toutes les nations
d’Europe, plus jamais l’enfer sur terre !
Les spectres des morts
font entendre longuement de lugubres gémissements sous la lune livide.
REQUIESCANT IN
PACE !
Seigneur, laisse les
reposer en paix !
SCHEINEST DU AUCH TOTEN DU GOLDNES
Des blindés passent avec fracas dans les rues. Des gravats tombent sur les épaules des amants s'enlaçant dans une maison en ruines. Leurs mains se tressent. Leurs lèvres se touchent.
SCHEINEST DU AUCH TOTEN DU GOLDNES
Des blindés passent avec fracas dans les rues. Des gravats tombent sur les épaules des amants s'enlaçant dans une maison en ruines. Leurs mains se tressent. Leurs lèvres se touchent.
Une voix vocifère: AUF MACHEN!
Ils avancent, ils chantent avançant entre deux haies de soldats brandissant des mitraillettes. Ils s'agenouillent sur le parvis de la cathédrale. Les chars les entourent, les canons tonnent, les
cloches hurlent.
Un oiseau picore des miettes près d'eux. Leurs doigts se nouent, leurs lèvres se frôlent.
LICHT DER LIEBE! SCHEINEST DU DENN AUCH
TOTEN, DU GOLDNES?
La ville brûle. Les façades s'effondrent et, béante, la cathédrale hurle de toutes ses orgues, de tous ses chœurs.
Leurs lèvres se joignent tandis qu'à coups de crosses, qu'à coups de bottes
SCHEINEST DU AUCH TOTEN DU GOLDNES?
ETE 69. LE SAUT.
et voici que
l'homme
l'avorton
le ver de terre
le vivant maladroit
hésitant
voici que
l'homme
la bête nue
la bête d'angoisse
voici que
l'homme quitte
sa caverne
préhistorique
la Terre
et fait
le
bond
vers
les étoiles
les étoiles
ETE 69. LA TERRE AU LOIN
au loin la Terre
la Terre tendre comme un sein
la Terre comme un fruit bien rond
la Terre aux grandes joues bleues
la Terre perdue dans le mutisme
des espaces infinis
au loin la Terre
avec ses rumeurs de guerre
ses schismes
ses espèces voraces
la Terre avec ses arbres
les rues des petites bourgades endormies
avec ses enfants allant à l'école le
matin
ses chats
ses assassins
la Terre au loin là-bas
qui n'en revient pas d'être la Terre
et qui hurle
et qui rêve sous ses écharpes de
nuages
ODE A JAMES BYRON DEAN
à l'occasion du 40° anniversaire de sa mort
à l'occasion du 40° anniversaire de sa mort
Route de Salinas,
Etat de Californie,
USA.
30 septembre 1955.
Un choc effroyable,
puis silence, plus rien ne bouge:
la mort, Jimmy, vient de te foudroyer
au volant de ta Porsche couleur argent.
Terrible silence du vaste soir rouge.
Et depuis pour l'éternité,
James Byron Dean aux cent masques,
tu es le visage du jeune dieu fantasque,
intraitable, splendide d'énigmatique beauté,
de sombre et sauvage insolence,
et pur comme l'éclair d'une lame de couteau.
Et depuis, James Byron Dean,
tu es définitivement
la figure-culte
du beau ténébreux en bleu-jeans
qui irradie les successives vagues de teenagers
montant à l'assaut de la vie.
Tu es pour toujours, Jimmy,
le jeune homme du siècle,
passionné et douloureux,
dérivant entre nostalgie de l'enfance
et soif de la vie intense,
entre quête d'amour et révolte.
Tu as rejoint Novalis,
Etat de Californie,
USA.
30 septembre 1955.
Un choc effroyable,
puis silence, plus rien ne bouge:
la mort, Jimmy, vient de te foudroyer
au volant de ta Porsche couleur argent.
Terrible silence du vaste soir rouge.
Et depuis pour l'éternité,
James Byron Dean aux cent masques,
tu es le visage du jeune dieu fantasque,
intraitable, splendide d'énigmatique beauté,
de sombre et sauvage insolence,
et pur comme l'éclair d'une lame de couteau.
Et depuis, James Byron Dean,
tu es définitivement
la figure-culte
du beau ténébreux en bleu-jeans
qui irradie les successives vagues de teenagers
montant à l'assaut de la vie.
Tu es pour toujours, Jimmy,
le jeune homme du siècle,
passionné et douloureux,
dérivant entre nostalgie de l'enfance
et soif de la vie intense,
entre quête d'amour et révolte.
Tu as rejoint Novalis,
Keats, Rimbaud, Lautréamont
au ciel des génies météoriques
où d'autres vous suivront,
étoiles filantes du rock'n roll.
Eternel adolescent, tu incarnes à jamais
la fureur de vivre
au ciel des génies météoriques
où d'autres vous suivront,
étoiles filantes du rock'n roll.
Eternel adolescent, tu incarnes à jamais
la fureur de vivre
affrontant la désespérance
du temps blême d'absence,
du temps sans Dieu.
Tu es le frère à jamais
des enfants rebelles
perdus dans le monde désertique
et qui se jettent rageusement
contre les barbelés de l'empire adulte,
du saint empire de la grisaille moderne.
Enfants rebelles
with a cause
car ce monde, frères humains,
ce monde où nous nous complaisons,
larves minables,
ce monde est purement et simplement invivable,
irrespirable son air,
inacceptable son ordre de fer,
pour les chercheurs tourmentés
de l'impossible tendresse,
pays de neiges incandescentes
et de fraîcheurs de menthe.
du temps blême d'absence,
du temps sans Dieu.
Tu es le frère à jamais
des enfants rebelles
perdus dans le monde désertique
et qui se jettent rageusement
contre les barbelés de l'empire adulte,
du saint empire de la grisaille moderne.
Enfants rebelles
with a cause
car ce monde, frères humains,
ce monde où nous nous complaisons,
larves minables,
ce monde est purement et simplement invivable,
irrespirable son air,
inacceptable son ordre de fer,
pour les chercheurs tourmentés
de l'impossible tendresse,
pays de neiges incandescentes
et de fraîcheurs de menthe.
2003.PAIX POUR LES ENFANTS D’IRAK
Que s’arrêtent les
jours de colère sur l’Euphrate et le Tigre,
que finisse la nuit,
nuit de feu et de sang, géhenne
de déflagrations, de
dévastations, de hurlements de sirènes,
que cessent les jours
et les nuits de colère,
les jours et les nuits
d’enfer
et de mort pour les
enfants d’Irak ;
que le ciel ne se
déchire plus au-dessus de Bagdad,
mais neige des fleurs
sur les enfants d’Irak,
SALAM ALIKOUM,
LA PAIX SOIT AVEC
VOUS !
Que resplendissent de
nouveau les matins de menthe
frémissants de
sources, de brises veloutées,
que la terre se couvre
de verdure munificente ;
que les missiles
éclatent en myriades d’ailes candides
au-dessus des coupoles
d’or, des minarets de Kerbala, de Nadjaf,
au-dessus des derricks
de Kirkouk,
explosions de paix,
houles de douceur fluide
pour les enfants
d’Irak,
SALAM
ALIKOUM !
Que les déluges
d’acier et de flammes
se transforment en
tempêtes de tendresse ;
que les chars
roulant sur le sanglant macadam
se dissolvent dans la
lumière suave du printemps ;
que les mères ne
gémissent plus sur les cadavres glacés
des enfants de Bagdad,
de Bassorah, de Mossoul,
mais serrent de
nouveau contre leurs seins
les menus visages
effarouchés
des enfants d’Irak,
SALAM ALIKOUM !
Que les pères
reviennent déambuler fiers et légers
à l’ombre des
palmiers,
portant leurs fils
sur leurs épaules ,
donnant la main à
leurs filles aux yeux de cantilène ;
que les crépuscules
d’été
basculant en l’abîme
étoilé
abreuvent de leur
vaste haleine
l’âme rêveuse des
beaux enfants d’Irak,
SALAM ALIKOUM !
Que s’efface la peur,
la peur empoignant jusqu’aux tripes,
la peur des enfants
terrifiés par les orages d’apocalypse,
la peur des enfants
blessés, des enfants errant regards hallucinés
parmi les décombres,
les chaussées défoncées
et les amoncellements
de corps déchiquetés,
ta peur à toi, ton
tremblement, petit Haidar, que les murs s’écroulent
sur ta famille
rassemblée durant les heures d’effarement
et vous écrasent tous,
ta peur à toi, ta
panique, petite Shimaa, que des soldats vociférants
fassent irruption et
te tuent ou emmènent ton père et tes grands frères ;
que cessent les jours
et les nuits d’effroi et de colère
et que la fidèle vie
familière
vous prodigue de
nouveau sa profonde sérénité,
à vous, pauvres
enfants d’Irak traumatisés, mutilés, abandonnés ,
SALAM ALIKOUM !
Que prennent fin les
maladies, la soif, la famine,
les larmes de
l’enfance orpheline ;
que les marchés regorgent
de fruits, de légumes, d’épices, de farine
et de limpide liesse,
que la délectable
odeur du pain remplace celle de la poudre,
qu’en cette terre
d’immémoriale sagesse
les écoles résonnent
des claires leçons du savoir humain,
calligraphie, subtil
art du calame, algèbre,
hautes récitations du
Livre ;
que reprennent
partout les grands et méticuleux travaux
de paix,
fourmillante activité
des tisserands, des lavandières, des potiers,
des marchands, des
paysans, des lettrés ;
qu’après le temps
d’oppression ,de mensonge et de terreur,
le temps des massacres
et des bombes,
le temps des ruines et
des tombes,
reverdisse comme un
continent nouveau le temps de liberté,
le temps de créer, de
rêver, de jouer, de conter,
le temps d’aimer, de
rire, de chanter et de danser
au son des flûtes et des tambourins,
le temps du simple
bonheur pour les enfants d’Irak,
SALAM ALIKOUM!
Que les monstres aux
sourires mielleux, aux pensers fielleux,
ne grimacent plus sur
les écrans du monde,
que les visionnaires
cauchemardesques de l’Axe du Chaos
suspendent leurs
cogitations insanes,
que les casseurs de
l’humble merveille quotidienne,
les manipulateurs de la terrifiante machinerie de
guerre et de néant
osent regarder en face
de temps en temps
la détresse et le
malheur propagés par leurs soins
et que les touche un éclair de miséricorde
pour les petits
enfants d’Irak,
SALAM ALIKOUM!
MISERICORDE ET PAIX!
Qu’ils entendent, les
fauteurs de guerre,
les millions de voix qui à travers toute la terre
crient PAIX, FRIEDE, PAX,
PAZ, PEACE, SHALOM,
SALAM ALIKOUM, LA PAIX
SOIT AVEC VOUS,
ENFANTS D’IRAK !
De silencieuses
théories d’enfants sortent du fond des âges,
Sumer, Assyrie,
Mésopotamie,
enfants kurdes,
sunnites, chiites, chrétiens,
ils s’avancent sur les
chemins d’Abraham,
sur les chemins de Jésus,
sur les chemins de Jésus,
sur les chemins
de Mohammed, d’Ali ;
parmi un peuple de
stèles et de mosaïques,
sur des sentiers de
vie, haute douce folie,
ils s’acheminent,
au milieu du printemps
en floraison le long des fleuves mythiques,
vers l’arc-en-ciel
prophétique,
l’immense arc de paix
pour tous les enfants de l’Irak,
SALAM
ALIKOUM !
ODE PLANETAIRE A MICHAEL JACKSON
La nouvelle a fait le tour du globe en un éclair : MICHAEL JACKSON EST
MORT. Stupéfiant impact planétaire quasi immédiat.
MICHAEL JACKSON EST MORT. Elle a rendu
son dernier souffle, la bouche d’ombre, la bouche d’or. Et les fans
catastrophés n’en reviennent pas. Larmes, cris de désespérance des lolitas
effondrées, des ados faux durs tout à coup orphelins. Ils sont atterrés, les
fans de tous les continents.
MICHAEL JACKSON EST MORT. Ils pleurent,
les couples enlacés inconsolables se souvenant de THRILLER, de BEAT IT, de BAD
et de leurs premiers émois amoureux lors de la découverte fascinée de ces
albums emblématiques.
MICHAEL JACKSON EST MORT. MICHAEL
JACKSON EST VIVANT. Les nymphettes, les jeunes mâles se trémoussent, se
contorsionnent. Les projecteurs éclaboussent les visages de leurs faisceaux de
lumière impitoyable. Irrépressible besoin d’admiration, d’adoration, besoin de
musique tendre et sauvage, de verbe saccadé, syncopé, besoin de danse, de joie
libératrice des corps. Elle remue au pied de la scène, la fourmillante, fébrile
forêt de bras tendus vers le dieu de la pop music. Besoin d’intégration au chant
profond du monde, à la communion des vivants, besoin de désintégration,
d’explosion, de folie, besoin de vie avant le saut final, salto mortale.
MICHAEL JACKSON EST VIVANT. Il danse la
beauté, il marche la beauté. MOONWALKER. Instants magiques. Beauté solaire,
lunaire, masculine- féminine . Il
chante la beauté, voix suave, apocalyptique. Il chante, il danse, fleur du mal
et corps eucharistique, beauté de négro-blanchitude, arc- en- ciel noir blanc
rouge jaune, beauté moderne, transmoderne, hallucinée.
MICHAEL JACKSON EST VIVANT. Ils ont faim
de beauté et de vie, les enfants de la terre, et ils boivent les airs, les
images, les métamorphoses fulgurantes du Roi de la pop.
Millions d’yeux levés vers l’icône
incandescente.
Et soudain à l’annonce de sa mort
inattendue, le choc et le deuil universel et l’ardent recueillement,
l’hommage planétaire, par-delà les
sexes, les âges, les races, les classes sociales. WE ARE THE WORLD avait
proclamé le prophète électronique et le monde y répond par un hommage unanime à
l’heure de sa disparition.
En notre temps soi-disant
individualiste, en notre monde atomisé, l’humanité a soif de communion. Les
jeux arides et cyniques des pouvoirs politiques et économiques ne lui suffisent
pas. Soif d’une autre ferveur qui faute de divin authentique se concentre sur
des figures déifiées par les foules, ersatz de sacré souvent frelaté dans un monde sans sacré.
MICHAEL JACKSON EST MORT. Il entre dans
la Légende dorée des superstars, le paradis des étoiles de première grandeur,
James Dean, Elvis Presley, Marilyn Monroe, Jimmy Hendrix, John Lennon…Il a été
la star mondiale incontestable de toute une époque dont il a synthétisé les
contradictions : le rêve d’innocence, de « liberté libre » et
les risques de dérives perverses, la quête inextinguible de nouvelles
sensations de poésie totale et l’attraction stérilisante de la richesse et de
la célébrité, la propension au futile et le sens de la compassion…
MICHAEL JACKSON EST MORT. Le monde
entier, Los Angeles, New-York ,Paris, Pékin, Melbourne ,Londres,
pleure, chante, danse sa disparition et son entrée dans la Légende.
Besoin d’adoration. Dieu est mort et les
Idoles vivent et les Idoles meurent et ressuscitent en Légende dorée.
MICHAEL JACKSON EST MORT. L’aube se lève
livide. Le Prince candide et trouble du royaume d’enfance, l’Ange au gant blanc
pailleté n’est plus. Il n’est plus, le divin déviant, le mutant diabolique
dont nous adorions les transes chamaniques. Les rêveurs rimbaldiens se
réveillent. La faim d’amour reste entière. Où est Dieu ? demandent les
enfants. Et les malins vaseux leur
répondent : ne cherchez pas l’impossible, contentez-vous de l’immémoriale
routine de non-vie.
MICHAEL JACKSON, QUAND REVIENDRAS-TU
D’AU-DELA DES ETOILES, DU ROYAUME D’ETERNELLE INNOCENCE ? Les enfants ne
veulent pas mourir de faim d’amour. Le monde ne veut pas mourir de faim de
beauté.
AFIN QUE CROISSENT DES
PEUPLES D'ENFANTS
Bleu
s’épanouissant en palmes mouvantes
vertigineusement au-dessus de la mer
comme ce long cri de colère aux
vibrations du sang
usines métro
au vaste azur souriant
des méditerranées
noir fracassant s’écroulant
se lèveront les poings dans le matin
gluant des banlieues
les poings meurtris frapperont la grande
porte d’acier
et s’épanouissant la vertigineuse
clameur
montera dans le ciel
matin de mort
voici la mer
voici bleu et frémissant de sources
et tu chantes
ton sang inonde l’avenir
et les poings s’ouvrent en fleurs
dans la grande rumeur des villes
afin que des peuples d’enfants
croissent au cœur des mers
ET FREMISSANT DE SOURCES LE MATIN
INVISIBLE
Un homme ensanglanté titube dans la rue.
Ses mains flambent et ses yeux sont crevés.
Une foule flasque l'entoure mais ne le voit pas.
NOIRS ECLAIRS
miroirs qui saignent frappés de doux regards
marbre de brume meurtri d'orages
éclairs sombres
parmi les roses
éclairs suaves
dans les crânes
éclairs noirs
sur la neige fraîche
sur la neige chaude des chairs
les bêtes éclatent
somptueusement sanglantes
organes déchiquetés
loques de viande
éclairs rouges
perforant
la blancheur des vierges sacrifiées
sur le marbre noir des autels
éclairs d'or
rires solaires
orages de gloire
sur la terre des centaures
MIROIRS QUI SAIGNENT
ECLABOUSSANT LES FLORAISONS CANDIDES DANS LES VERGERS
Un homme ensanglanté titube dans la rue.
Ses mains flambent et ses yeux sont crevés.
Une foule flasque l'entoure mais ne le voit pas.
NOIRS ECLAIRS
miroirs qui saignent frappés de doux regards
marbre de brume meurtri d'orages
éclairs sombres
parmi les roses
éclairs suaves
dans les crânes
éclairs noirs
sur la neige fraîche
sur la neige chaude des chairs
les bêtes éclatent
somptueusement sanglantes
organes déchiquetés
loques de viande
éclairs rouges
perforant
la blancheur des vierges sacrifiées
sur le marbre noir des autels
éclairs d'or
rires solaires
orages de gloire
sur la terre des centaures
MIROIRS QUI SAIGNENT
ECLABOUSSANT LES FLORAISONS CANDIDES DANS LES VERGERS
DE BRUME DOREE
les miroirs obscurs
dans les vergers
de brume dorée
éclatent et saignent
éclaboussant
les floraisons candides
des cerisiers
MEURTRES PARMI LES MIROIRS
Le brutal éclair de l'acier luit
au-dessus de la mer blanche des lits.
Glaces, diamants, rayons: déesses lascives.
Soudain terrorisées.
Sous les lambris se tordent les cyclones;
les épées flammes furieuses
plongent
vers les gorges
et la soie voilant les cuisses.
Giclées de sang contre les miroirs,
clameurs;
longues lamentations répercutées par les couloirs,
jusqu'à ce que, vers l'aurore, le lait bleu du silence
ait noyé les vastes chambres.
GICLEES DE SANG
LONGUES LAMENTATIONS
TENDRES ENERGIES DE NEIGE
Des nuques de nymphes
dans les tourbillons de nuit
s'ouvrent
et répandent
de tendres énergies
de neige,
nébuleuses
qui nimberont
l'incandescence des astres
derrière la dentelle angélique
tissée entre le ciel et l'enfer.
DANS LES TOURBILLONS DE NUIT
TRAVAUX DANS L'AZUR
Les pelleteuses d'enfer
creusent des fosses dans l'azur.
De gigantesques mottes bleues
s'accumulent sur les chaumes des hauteurs.
De la plaine, un peuple de nains marmonneurs
suit ces travaux perpendiculaires
et regarde avec stupeur
les énormes entassements translucides
qui surplombent
de plus en plus vertigineusement
les hameaux placides.
LES FOUDRES NOIRCISSENT L’OR DES
OSTENSOIRS
La cathédrale s’effondre
et le maïs immensément envahit les
ruines
avec une calme violence.
Les temples ouverts à l’azur libre
retentissent du cantique des luxures
printanières.
Des gerbes de sang tiède inondent les
livres,
Korans, Védas,
Bibles.
cantique des luxures printanières
BÊTES SACREES VEINEES DE LAVE
Les bêtes sacrées, veinées de lave,
traversent fougueusement la buée de l'aurore,
escaladent les montagnes de fraises
qui séparent le pays des Nuages de celui des Bannières,
et, se cabrant sur les crêtes chenues,
dressent leurs corps d'ébène
vers l'Etoile radieuse du Matin.
EUSTRIE DE NACRE
des artères de mazout la sillonnent
scintillement des jardins de reines
lentes comme le lait
torrents en fête dans les vallons
aux brises veloutées
Eustrie songe ocellé où calmement se meuvent
les amantes mérovingiennes aux yeux de voie lactée
du fond des Asies les races rauques avancent vers tes verdures
tes eaux printanières
chevauchent vers toi Eustrie de glaise tendre
les rois rouges
verdure de cruautés
verdure de cruautés
verdure de cruautés
DERRIERE LA FORET D’OS
Une nuit fragile se lève derrière la
forêt d’os.
AU PIED DES MURAILLES DE LA FAUTE
Les nations habillées d’aigles
s’agglutinent dans les crevasses de la Peur.
Et les hauts murs de
la Mort se dressent au-dessus des foules muettes.
Et l’Ombre passe sur
les têtes, la terrifiante brusque Obscurité.
Et les bouches de la
Terre s’ouvrent avalant les peuples de l’Angoisse.
Et les oiseaux
vertigineux s’envolent au-dessus des pierres de la détresse terrestre.
Oh ! ce silence
d’agonie au pied des murailles de la Faute.
Les murs se dissolvent.
Les morts montent des caves remplies de
vapeur.
On sent dans l’air l’odeur des crimes.
Tout se tait
et les feuilles flambent de verdure
noire.
silence d’agonie
au pied des murailles
silence d’agonie
au pied des murailles
de la Faute
LUBRICITES SUAVES
Des lubricités suaves
enveloppent les pylônes
de floraisons blanches.
Les abattoirs retentissent
de meurtres mordorés.
NUIT SUCCULENTE DE MORT
Nuit succulente de mort
dans les tombeaux de la
débauche.
Hurlez de douceur en pénétrant
la charogne des reines.
Dévorez ces soleils de pourriture
dans les viscères
où fermente la fange funèbre.
tombeaux de la débauche
où fermente
la fange funèbre
la fange funèbre
DANS LES VALLEES D'HORMORE
Tes poumons palpitent de flammes
fraîches
des frissons de feu parcourent tes
entrailles
entre tes fesses verdoie le phalle
et crache
rugit d’opalescence
dans tes excréments
et s’enfonce dans ta fange brune
dans tes profondeurs nauséabondes
se blottit
palpitant
dans ton derrière de prêtresse
dans tes pâles fesses
de vierge
et parfois nous devenons loup et louve
frémissant dans les vallées d’Hormore
INSTINCTS DE GLAISE
Dans la terre,
dans la brunâtre douceur des vers,
dans la torpeur des taupes,
avec nos ardeurs de mort,
avec nos instincts de glaise,
terriblement nous mangeons la boue,
nous dévorons la fange,
mâchons l’argile tiède, blanche,
ruminons sous la mollesse des orages,
gisant dans le sombre silence des tombes,
au fond des fosses tapissées de muqueuses,
avec les scolopendres
langoureusement nous sommeillons,
rêvant de noirceurs délicieuses.
PARMI LES TENDRESSES VERDÂTRES
Parmi les tendresses verdâtres
Parmi les tendresses verdâtres
Ô foulques ô fougères
se prélassent les hameaux d'Eustrie
ô frais flocons frôlant les frondaisons d'avril
la poreuse substance du printemps glisse des remparts
de neige
la menthe d'aurore fait étinceler les charrues
jaillissements de miel de salive dans la fange d'or des champs de
colza
vivre
près de la lumière
avec ce venin tendre
de la mort parfois
infusant le vent
tempêtes de tendresse
sur l'herbe des pelouses
la jaune neige de mai
couvre la boue des caresses
vivre
la fable des ailes
la liberté des éclairs
les vitres rutilent
dans le blond visage
des maisons
où glissent des ombres
de pigeons
VIVRE COURONNE D'ORAGES DE ROSES
fragiles visages
piétinés de ténèbre
corps renversés
dans les gouffres de la volupté bleue
au sommet des collines
GOUFFRES DE LA VOLUPTE BLEUE
morsures d’azur sous les seins
remuant le fumier des hanches molles
MORSURES D'AZUR
les barques d’enfance dérivent dans la
lumière
barques de mort
dans l’été ténébreux
ARBRE AUX PLAIES NOIRES
arbre aux moignons
aux
plaies noires
couvert d’yeux
de verrues
de lèvres qui saignent
des êtres de verdure
mangent du miel
vautrés sur
la mousse rouge
Vision
Tu marches dans la rue
et là-bas la vision violente du Royaume
illumine les longues files de voitures,
les foules fabuleuses de la ville moderne.
Tu entres dans un bistrot
et tu bois un café bien chaud
en pensant au Golgotha.
Un clochard passe sur le trottoir,
le visage tuméfié.
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